« Le sexisme est une culture qu’on a créée »
Thomas – France
Un camarade de promotion, en école de commerce, m’a dit qu’une femme ne pouvait raisonnablement pas jouir, ni même se masturber avant d’avoir rencontré un homme qui leur montrait comment faire.
Cet homme, qui est censé faire partie d’une frange de la population éduquée, montre exactement ce que peut être l’ignorance et le sexisme au quotidien. Sur quelque chose qui parait juste trivial, sexuel et très privé en fait, on peut très rapidement dériver vers des idées reçues sur lesquelles se base toute une société, des idées préconçues sur la place de la femme ou sur ce qu’une femme peut être. Typiquement, quand ce gars pense qu’être un homme c’est montrer aux femmes ce que c’est que la vie, c’est normal. Il ne réalise pas qu’il relègue d’une certaine manière la femme au rang d’enfant, d’animal, à qui il faut montrer la vie. Et si ce type de 25 ans ne réalise toujours pas que ses idées sont fausses, c’est que jusque-là personne ne lui a prouvé qu’il avait tort. Qu’il a peut-être rencontré des femmes avec qui il a été intime, qui n’ont pas voulu ou osé le contredire.
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Si un homme se fait maltraiter par sa femme, on ne va pas le prendre au sérieux
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Ce n’est pas juste une partie de la société, les hommes, qui se voilent la face, mais c’est la réalité qui se crée finalement sur la base d’idées préconçues. Tout le monde s’imagine que quelque chose est vrai, et ça devient la réalité. Je trouve ça dommage parce que ça va très vite s’établir au quotidien sur d’autres domaines. Les femmes pédophiles par exemple, on refuse tout simplement d’y croire. Parce que les femmes sont plus gentilles et plus douces. Elles n’ont pas de pulsions, elles n’ont pas de désir, ni de plaisir, ni de besoins. Et là, tout de suite on retombe dans le stéréotype du petit animal qu’est la femme, ce petit enfant, qui est là juste pour se soumettre au désir de l’homme. Et c’est sûr que personne n’accepte ces idées, mais ils vont en accepter les prémices, les bases de la logique qui mène à cette conclusion. La société accepte que la femme soit considérée comme quelque chose à part, ne serait-ce que parce qu’ils acceptent le début du raisonnement. Et beaucoup de femmes d’ailleurs acceptent ces fondations, ces idées. Et à partir de là, elles se fondent une réalité qui est la leur, et qui est vraie. Si elles sont persuadées qu’elles ont moins envie que les hommes, elles auront moins envie. Et si elles se disent qu’elles sont là pour se soumettre à l’homme, elles seront soumises. Et de fait, jamais, elles n’auront envie d’évoluer en société parce qu’elles se diront juste « c’est comme ça ». C’est des petits préjugés, des idées qui paraissent minimes : on va dire par exemple que la femme a moins envie que l’homme par exemple. Donc au final, elle n’a pas tant que ça de désir. On ne doit pas la satisfaire. Et pourquoi aurait-elle la même place dans le couple puisque les rôles sont différents ? Si elle n’a pas la même place que l’homme dans le couple, pourquoi l’aurait-elle dans la société ? On part d’un tout petit stéréotype, et ça devient un fait de société.
Un autre exemple. Aujourd’hui, beaucoup de gens s’insurgent des violences faites aux femmes. Pour la majorité des gens ça va être insoutenable, indéfendable et inexcusable. Et tant mieux ! Mais par contre, dès qu’on inverse les rôles, ça devient tout de suite comique, comme dans le film « Comment tuer son boss », où l’employé se fait régulièrement harceler et agresser sexuellement par sa patronne. C’est juste censé être drôle en fait. (silence) L’inverse n’aurait juste pas été possible Et c’est accepté socialement que ce n’est pas si grave… Si un homme se fait aujourd’hui un peu maltraiter par sa femme, on ne va pas le prendre au sérieux. Alors que ce sont des situations extrêmement graves. On leur dit d’arrêter de se plaindre, qu’ils exagèrent, ou on va juste les tourner en dérision… Ce seront eux les faibles en fait… ou alors c’est peut-être eux le problème. Peut-être même qu’ils ont tout inventé ? Peut-être même que tout est de sa faute finalement… Et ça, c’est une violence énorme de la part de la société.
Le sexisme, ce n’est pas quelque chose d’imposé par l’homme ou subi par la femme, c’est une culture qu’on a créée et qu’on continue de faire vivre, ne serait-ce que par ce qu’on accepte des lieux communs et on accepte des idées qui pourraient être fausses si juste on acceptait d’y croire…
Le sexisme au quotidien ne parait pas forcément gravissime, et n’est parfois pas gravissime, mais il est la cause de situations inhumaines.