« Si j’avais été un mec, j’aurais pu faire ce sujet »

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« Si javais été un mec, jaurais pu faire ce sujet »

Margaux – France

Quand j’étais gamine, je me rappelle du machisme de ma grand-mère, qui interdisait à mon frère de débarrasser la table, et qui ne manquait jamais de m’appeler pour le faire. Elle lui passait beaucoup de choses parce que c’était un garçon, et me demandait de faire des trucs « de fille », comme le repassage. Les « laisse, Julien… Margaux, tu peux le faire, quand même ! » me rendaient dingue ! Le genre de sous-entendu qui te fait bien comprendre ta condition de femme.

Mais mon dernier « macho boulot dodo », c’était plutôt dans le milieu du travail. Je suis journaliste dans le milieu de la radio. J’ai eu un rédacteur en chef, assez âgé, qui avait les idées de sa génération et de son milieu aisé, avec certaines règles à l’ancienne, qui donnent à la femme une certaine position. Pour plusieurs sujets de reportages qui nécessitaient des déplacements, il choisissait le journaliste en fonction de son sexe. On a eu par exemple des sujets à faire sur des chantiers, de nuit, et là du coup, il était hors de question d’envoyer une fille… Il avait un côté très paternaliste en fait, un peu comme un papa poule. Le genre de truc pas méchant mais hyper vicieux. C’était « pour des raisons de sécurité », d’après lui. « Une fille ne va pas sur un chantier, la nuit, avec plein d’hommes, parce qu’il pourrait lui arriver quelque chose. » C’étaient des sujets encadrés, avec des professionnels, où il n’y avait pas vraiment de risque… Mais pour lui, dans sa tête, c’était un « sujet de garçon ». Un autre exemple, on devait faire un super sujet en hélicoptère avec l’armée. J’aurais tellement adoré le faire. Ce fut un non catégorique, sous prétexte qu’il s’agissait d’un milieu masculin. J’ai insisté en disant que j’étais très intéressée, il m’a répondu : « ce n’est pas un endroit convenable pour une fille ».

Après ça, franchement, que veux-tu répondre ? C’est la décision de ton supérieur. Et je savais que je pouvais oublier certains reportages. C’était hyper frustrant. Parce que j’étais une femme, je ne pouvais pas traiter certains sujets. Pas parce que je n’ai pas les compétences de le faire, juste parce que je suis une fille. Parce que je suis née elle et pas lui. Si j’avais été un mec, j’aurais pu faire ce sujet.

Depuis, je suis partie.

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